Voyage en Palestine
Grace
à mon stage au sein de CADFA, j’ai eu la possibilité de partir en Palestine fin
Novembre pour une dizaine de jours. Ce séjour était organisé par le
« Higher Council of Youth and Sports » (HCYS) entité issue du
gouvernement palestinien. Le HCYS a fait appel à diverses organisations
internationales (dont CADFA) dans le but de rassembler un nombre conséquent de
jeunes internationaux afin de réaliser le premier « Palestinian
International Youth Camp ». Ainsi, nous étions un peu moins de 200 jeunes
internationaux et palestiniens à participer à ce séjour. Nous aurions pu être
davantage si un nombre important d’internationaux n’avait pas vu leur entrée
sur le territoire refusée par les instances de contrôles israéliennes. Mon
travail consistait à préparer et à aider une partie des participants avant le
départ puis de diriger, en compagnie de deux autres « leaders », une
vingtaine de participants durant le séjour. Afin de préparer ce travail, les
leaders sont arrivés avant les autres et ont participé à deux journées de
formation à Jericho, plus vieille ville du monde, qui constituait le point de
départ dans ma découverte des territoires palestiniens.
Malheureusement, le HCYS avait choisi de diriger et de cadrer très fortement
le séjour. Je ne saurais dire si ce choix était planifié ou s’il s’est imposé
pendant le déroulement des jours de formation. Dans tous les cas, cela a
fortement impacté l’expérience et ce, sur plusieurs aspects. Premièrement, en
ce qui concerne le logement, les filles et les garçons ont été séparés ce qui
privait chacun de la moitié du groupe pour pouvoir discuter et échanger les
points de vue durant les temps libres. Les logements en eux-mêmes et les règles
imposées par le HCYS ont soulevé bien des contestations (interdiction de
sortir, nourriture et hygiène douteuses etc…). Outre ces problèmes auxquels
chacun peut s’accommoder pour quelques jours, ce qui m’a paru le plus
dérangeant reste la mainmise totale du HCYS sur le séjour qui s’est traduite
par des visites choisies et orchestrées de certains lieux et pas d’autres, des
passages au travers des checkpoints israéliens un peu trop faciles etc… Ainsi
que leur souhait affiché d’utiliser l’image des participants pour leur propre
propagande (donc celle du gouvernement in fine). Les participants se sont vus mitraillés de photos et filmés en quasi-permanence. Pour ceux qui
voulaient protéger leur image, ce fut un véritable parcours du combattant.
L’attitude du HCYS a été le sujet de bien des discussions et elle a alimenté
des conflits entre les parties, certains internationaux ont décidé de quitter
le camp en avance, ce qui est bien dommage. J’ai même entendu, au détour d’une
conversation, que les gouvernements israélien et palestinien avait un accord au
sujet de ce camp, ce qui je l’avoue me parait probable, au vu de son
déroulement. Cependant, je reste conscient que ce camp était le premier, que la
situation au sein du pays nécessite un certain nombre de précautions et je suis
persuadé que les membres du staff ont fait de leur mieux. Je regrette seulement
l’aspect quelque peu factice de ce camp, j’aurais préféré davantage
d’authenticité. Authenticité que je suis sûr de trouver si j’ai la chance de
partir avec CADFA comme seule instance organisatrice.
Les
territoires palestiniens constituent un aperçu de ce que pourrait être la
Palestine sans l’occupation israélienne, car il s’agit bien là d’une occupation
et non d’un conflit comme présenté parfois. Les territoires sensés, selon les
accords d’Oslo, être accordés aux palestiniens sont minés par la présence
israélienne. Il suffit d’emprunter l’une des rares routes de Cisjordanie pour
apprécier la multitude de colonies aux toits européens, de checkpoints et de camps
militaires. Je suis allé à Jericho, Bethléem, Ramallah, Nablus, Jérusalem,
Hebron et partout j’ai croisé des militaires israéliens, fusils en mains et
prêt à intervenir. Cela impacte directement sur la vie des palestiniens, il
leur devient très difficile de se déplacer. Certaines familles sont séparées
depuis des années, des gens sont ralentis, emprisonnés voire exécutés sur le
chemin du travail, de l’école ou en allant à l’hôpital. Outre la tragédie
humaine et l’irrespect des droits de l’homme que constitue cette omniprésence,
j’ai ressenti un immense sentiment de gâchis. Pour illustrer ceci, prenons le
cas de Jérusalem, point névralgique et ville capitale pour chacune des trois
religions du livre, remplie de lieux saints. Cette ville respire l’histoire et
la spiritualité, elle pourrait constituer un lieu de rassemblement et d’entente
premier pour les croyants et pratiquants du Judaïsme, de l’Islam et du
Christianisme. Au lieu de cela, elle est une source intarissable de conflits et
de tragédies. Mes visites à Jérusalem me laissent un gout amer, je ne saurais
dire si j’étais émerveillé, ou profondément dégouté par la situation. Au fil de
mes discussions avec des palestiniens il m’est surtout apparu que ces derniers
aspirent à une vie normale pour la plupart. Pas de haine envers les juifs ou
envers les israéliens, juste le besoin de profiter d’une vie qui leur a été
soustraite depuis trop longtemps. Je suis persuadé qu’il en va de même pour une
majorité d’israéliens, malheureusement je n’ai pas réellement eu l’occasion
d’en discuter avec des citoyens d’Israël, les seuls contacts que j’ai pu
entretenir furent avec des militaires ou des agents de contrôle à l’aéroport.
Lorsque
l’on arrive à l’aéroport de Tel-Aviv, avant même de fouler le sol d’Israël, on fait
face à la réalité de la politique ségrégationniste du gouvernement. Les
étrangers doivent entrer dans une file d’attente interminable avant de pouvoir
présenter leur passeport. Si vous avez l’air arabe, si votre nom ou votre
prénom possède la moindre consonance arabe, vous êtes priés d’attendre de
nouveau dans une salle d’attente dédiée afin que votre passeport soit de
nouveau examiné. Ce, quel que soit votre pays d’origine ou le motif de
votre présence. Moi par exemple, avec un passeport et un nom français, le teint
clair et une lettre du British Council, je suis passé sans encombre, même en
étant évasif sur la raison de mon voyage. En revanche, les personnes avec qui
je voyageais, avec un passeport britannique et la même lettre du British
Council mais avec un nom arabe ont été prié de se rendre dans la salle
d’attente. Je les ai rejoint, elle était évidemment remplie exclusivement
d’arabes. Certains évoquerons la sécurité, je préfère parler de discrimination.
En effet, la notion de sécurité appliquée ici implique que l’on admet que tous
les arabes sont potentiellement dangereux et terroristes.
Lorsque
j’ai quitté le pays notre taxi, conduit par un palestinien, s’est fait stopper
au dernier checkpoint avant d’arriver à l’aéroport (nous en avions déjà passé
2). Il s’en est suivi une première confiscation de passeport, une fouille
poussée du véhicule, un premier scanner de nos sacs et une série de questions
posées avec un ton agressif. Pourquoi étions-nous en Israël, comment et depuis
combien de temps nous connaissions-nous, qu’avions nous fait et en détail,
combien de temps ? Nous avons ensuite été escortés jusqu’à l’entrée de
l’aéroport, puis nous avons dû passer par une série de contrôle, différents
scanners, confiscation de téléphone et d’ordinateur portable, fouillage des
sacs, des chaussures, dégradation de nourriture (on vous demande d’ouvrir tous
vos paquets au cas où vous y cacheriez une arme). Enfin, les passeports nous
ont été rendu avec l’autorisation de quitter le territoire (du jamais vu en ce qui
me concerne) et un joli code barre indiquant votre degré de dangerosité. Le
premier numéro va de 1 à 6, plus le chiffre est élevé, plus vous êtes
dangereux. J’ai eu 6, MOI ! Pour couronner le tout, j’ai eu la surprise de
constater que mon sac en soute avait aussi été fouillé de fond en comble et
comportait le code barre. Je ne sais pas quel est le but réel de ces
agissements, spécialement lorsque vous vous apprêtez à quitter le territoire,
mais j’ai pu l’espace d’un instant apprécier la réalité d’une politique de
ségrégation. J’étais, selon eux, quelqu’un de dangereux, un ennemi d’Israël.
J’aimerais
pouvoir dire que je garde un beau souvenir de ce voyage. Des gens accueillants,
de magnifiques paysages, des lieux chargés d’histoire et une nourriture qui aura
changé ma vie… Mais la situation de ce pays relève clairement de l’apartheid.
Tout comme CADFA, je ne soutiens aucune organisation politique, je ne remets
pas en question la raison d’être d’Israël, mais je m’intéresse à l’humain. A ce
sujet, les droits de l’homme, quoiqu’on en pense, sont loin d’être respectés et
les violations sont légions.
Voici une galerie de photos réalisées durant le voyage, crédit : Emerson www.emerson-photography.co.uk
La première série de photo a été prise à Hebron, entre art, religion et présence Israelienne.
Ici, ce sont des photos prises durant une visite d'anciennes ruines proches de Jericho : Le palais d'Hicham.
Photos issues de la visite de l'université Al-Quds, à Abu-Dis, proche de Jérusalem. Le mur.
L'aéroport de Tel-Aviv, lieu de bien des désagréments.
Une vue de Jericho depuis les montagnes environnantes.
Cette série de photos fut prise lors de la visite de Ramallah. La tombe de Yasser Arafat, une vue de la ville et quelques photos d'un camp de réfugiés au sein même de la ville. Les enfants restent toujours souriants.
Ici, ce sont des photos prises durant la visite de Jérusalem, on peut observer une colonie sur la dernière.
Quelques paysages dans la ville de Nablus
Demonstration de Dabkeh
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